UNSEREN LEBEN IST 22 BARS

" C’est pas parce que c’est une connerie qu’il faut pas la faire "

Alain K octobre 1999

Pourquoi donc ?

Règlement

Les 22 bars par Alain K :

Les 22 bars par Laurent Quénéhen

Les 22 bars par Monsieur Maill.et

 

 

Pourquoi donc ?

 

 

L’idée de cette performance ( ?) est née de plusieurs facteurs :

  1. J’ai personnellement une série de photographies intitulée " ma vie est formidable ". Ce sont des photos de moi (moi sur la photo hein, pas moi qui l’ai prise !)
  2. En allemand, formidable ça se dit wunderbar (en gros)
  3. Un soir, un ami m’a pris en photo dans 2 bars de suite, et j’ai trouvé l’idée intéressante… Une tournée des bars avec une photo dans chaque bar…
  4. Monsieur Maill.et et Laurent m’ont proposé une expo comune sur le thème de AMA, des initiales de nos anciennes amies.
  5. La fin d’une relation se conjugue souvent avec des cuites carabinnées.
  6. Sur mon appareil photo numérique, on peut faire 66 photos (en fait on peut en faire 70, je l’ai découvert après !), et 66/3=22… Et on est 3.
  7. Et 22 bars, ça ressemble à…

C’est pourquoi " Unseren leben ist 22 bars " fut à propos dans cette exposition.

La suite appartient désormais à l’histoire.

 

 

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        ULI22B – règlement 

 

Art. 1 : MM Maill.et, Quénéhen et K vont devoir dans le temps qu’ils jugeront nécessaire faire une tournée de 22 bars.

Art 2 : Une photographie de chaque participant sera prise à la fin de chaque consommation.

Art 3 : Obligation de boire une et une seule boisson alcoolisée dans chaque bar.

Art 4 : Chaque participant doit remplir à chaque bar, selon ses moyens physiques, une case de sa feuille de route en y indiquant :

  • L’heure de la photo
  • Le n° du bar
  • Le nom du bar
  • La nature de la consommation
  • Le prix payé
  • Son taux d’alcool évalué (échelle proposée : entre 1 et 3 étoiles)

Art 5 : Il est interdit formellement de donner de sa boisson à un tiers (même pour faire goûter), ou d’en verser dans les plantes.

Art 6 : Il est interdit de conduire un véhicule quel qu’il soit durant et après la performance.

Art 7 : Les coups à boire payés par un tiers seront annotés 0,00 F sur la feuille de route.

Art 8 : Les photographies seront prises par l’un des trois protagonistes, l’appareil orienté pour faire des clichés verticaux.

Art 9 : Faudra pas le dire à ma mère !

Art 10 : De ce matériel (66 photographies + 66 papillons remplis par les protagonistes) sera tiré un panneau de 60X80 à 4 exemplaires.

Art 11 : Chaque participant gardera par de vers lui un exemplaire, le dernier sera vendu prix coûtant, soit le prix des consommations, des taxis éventuels pour rentrer saoul à la maison et des matériaux utilisés pour la confection des 4 panneaux.

 

 

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Les 22 bars par Alain K :

 

Le vendredi 15 octobre 1999…

13 h 45 : Je suis dans le métro, j’ai rendez vous avec Laurent et monsieur dans un quart d’heure à l’Eléphant du Nil.

Je suis partagé entre l’inquiétude (est –ce qu’on va y arriver ?) et le sentiment de me préparer à entrer dans l’histoire.

14 h : Laurent arrive, on s’attable, il fait beau. Monsieur arrive le dernier. On commande, c’est parti, on boit. Le premier. On rempli la première case de notre feuille de route. On fait la première photo. Moment émouvant.

18 h 40 : Nous sommes dans le douzième bar, et là je commence à douter. Je vais pour la première fois apposer 3 étoiles dans la case taux d’alcool. Au onzième bar, j’ai pris les photos des deux autres dans le mauvais sens (ça je ne m’en suis pas encore rendu compte, j’ai mon compte).

Nous avons des visiteurs qui nous soutiennent. Pour l’instant nous sommes dans les temps. On va peut être envisager de ralentir le rythme.

21 h : Nous venons de faire un break pour manger. Je ne vais pas mieux. J’ai vomi un peu, et c’était très bien (pour vomir, rien ne vaut un vieux chiotte crasseux à la turque dans un bar !). On repart, allez, plus que sept bars, c’est la dernière ligne droite !

0 h : J’en peux plus de la bière ! J’en peux plus de boire ! C’est la première fois que je bois de l’alcool sans en avoir envie…Je viens de passer au GET 27 (c’est joli comme couleur à vomir).

1 h 44 :Ca y est ! On y est arrivé, et sans tricher, nos enfants seront fiers de nous 

 

 

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Les 22 bars par Laurent Quénéhen :

 

Je me disais que cela n’allait pas être facile : 22 bars, il faut se les farcir. Ce n’est pas que je n’en aie point l’habitude, disons que je bois sans prévoir, tout du moins sans prévoir la quantité que je vais boire. Il m’arrive parfois dans les cas de hautes détresses de préparer quelques balises alcoolisées pour ne pas me sentir blessé tout seul chez moi car c’est bien connu : il n’y a rien de mieux que l’alcool pour désinfecter les plaies. Mais ce jour là, ce vendredi là, puisque c’était un vendredi, j’allais boire sans être particulièrement angoissé, j’allais boire pour l’ivresse, pour le voyage, pour la fuite, pour la liberté, pour l’art, pour l’état de grâce…

Il devait être dans les 14 heures lorsque je pris mon premier verre. Tout se passa bien ; je n’ai pas l’habitude de boire si tôt mais tout se passa bien : Il faisait beau, nous étions en terrasse, le barman était sympathique et des myriades de filles défilaient devant nous en jeans serrés.

Le second bar : un bar pd, paraît-il, pas trop remarqué. Continuons : nous voguions, moi et mes deux acolytes, d’une voile alerte, défiant la pesanteur, vers notre destin alcoolisé ; laissant loin derrière nous les buveurs d’eau minérale. Au détour d’une rue sans vie, je veux dire sans bars, nous découvrîmes l’Eldorado : un panel de troquets s’offrait à nous. Nous étions dans une des rues les plus achalandées du Marais.

Et de un, et de deux et de trois et de quatre : la croisière des bières se déroulait sous un ciel empli de bouteilles et nous sentions les regards admiratifs des piliers de comptoirs. Je commençais à être gai et ce n’est pas pour me vanter mais certaines personnes habillées de cuir et de moustaches me regardaient parfois d’un air doux. Le bateau commençait à tanguer mais je ne me sentais pas encore prêt pour jeter l’ancre et m’amarrer à la première bite venue, comme dirait le Sieur Alain : on a sa dignité.

Nous décidâmes d’un commun accord de barrer à tribord et nous filâmes vers d’autres mers moins velues. L’alcool me chauffait les neurones et des moussaillons nous avaient rejoints sur le pont : il y avait un grand blond, une brune et une plus jeune mi-blonde mi-brune. Cette dernière rappela à mon souvenir que mon amour m’avait quitté et qu’il fallait que je me débarrasse au plus tôt de la mélancolie latente qui me faisait dériver. Elle s’appelait Marie et je la trouvais plutôt marrante. J’appris à mon grand désarroi qu ‘elle n’avait que dix-neuf ans et que son petit copain allait bientôt nous rejoindre. N’étant ni Joseph ni Juda, je pris le parti de me concentrer sur notre expédition et de me boucher les oreilles lorsque j’entendrai de nouveau le chant des sirènes. Les quelques bars qui suivirent me furent néanmoins difficiles : ma décision d’oublier le beau sexe m’attristait et mon chagrin, que j’espérais noyer dans l’alcool, apprenait tranquillement à nager ; je savais dorénavant qu’il fallait que je fasse avec. Heureusement que mes compères étaient là, la solidarité dans l’ivresse engendre de joyeuses alternatives : nous venions d’aborder une exposition de Boltanski où nous tentâmes d’engager une partie de cache-cache sous le regard affolé du galeriste. Il nous fit comprendre  que l’art : " l’AAARRRT, voyez-vous ", eh bien, c’était pas pour rigoler. Nous étions en pleine performance pacifiquement artistique et cet abruti endimanché craignait pour son image de marque. Nous envoyâmes un de nos plénipotentiaires prouver par A + B au triste sir que si le dénommé Boltanski eut été présent, il aurait sans doute souri. Ce qui, entre-nous, m’étonnerait quand même. Mais rien n’y fit et nous fûmes prestement mis à la porte de son tabernacle. Cette histoire d’art, eut malgré tout, le don de me faire oublier mon histoire d’amour écourté. Nous poursuivîmes, toute voile dehors, la découverte de nouveaux océans mousseux.

La nuit tombait, Bastille s’offrait à moi, tel un phare dans la nuit.

 

Le Lèche vin, les Ferrailleurs, autant de noms mythiques qui me firent basculer, sans nul espoir de retour, vers un tangage plus vrai que nature : des vapeurs de gueuze m’emmenaient vers une mort subite et je fis naufrage entre Adel et Scott, non loin de la rue de Lappe.

Je sentais mes entrailles se déchaîner et je choisis de passer l’arme au vin. Ce fut du rouge, puis du blanc et encore du rouge, la fin approchait, je pensais à ma mère et à son absence : "ah ! L’amer… ", comme dirait mon psy… Je tournoyais sur moi-même mais une corde symbolique m’attachait à mes comparses afin que je puisse tenir le cap. Le sol se dérobait sous mes pieds et un vent de force 9 risquait à tout instant de me faire chavirer, je priai le seigneur et la petite Marie de ne pas me laisser errer au gré des flots. Une figure de proue de notre équipage gerba son sandwich dans le water-closet et j’imaginais une cascade de viande grecque avariée illuminer le ciel, déjà bien étoilé, d’un feu d’artifice apocalyptique. L’œil mauvais de la barmaid me fit faire un détour périlleux pour soulager ma vessie.

Les deux derniers bars furent pour moi la débandade complète, je ne savais plus à quel vin me vouer, j’oscillais entre les mers du sud et la rue des martyrs : heureux d’amarrer mais encore à fond de cale. Je me refis une mise en bière en compagnie d’un pirate au long cours qui avait abandonné son mioche à sa sirène. Étant devenu bizarrement moraliste en cette fin de parcours, je faillis bel et bien me prendre une mandale. Par chance, une Miss à la silhouette fine et aux talons hauts venait de nous rejoindre. Elle me sauva du naufrage par un sourire à l’intrus qui eut pour effet de lui faire oublier son mioche, sa femme et moi-même.

Dernier bar, dernière danse, dernier verre : la fin du voyage me redonna un semblant d’aplomb et je fis mine de tenir la barre lors de notre arrivée au port. Une foule de jouvencelles m’attendait à quai, elles avaient les yeux mouillés d’émotion et le reste aussi : j’avais vaincu le vin, la bière et l’ouragan, j’étais le roi des mers, le chef des sioux, Dieu sur terre. J’avais atteins l’état de grâce et je voyais des sampans dorés s’éloigner sur la mer de Chine, des chinoises surfaient sur les vagues en m’envoyant des baisers, j’entendais des péruviennes m’appeler du haut de leurs montagnes et des africaines en goguette dansaient autour de moi : j’étais bel et bien complètement bourré.

Je rentrai dans mes pénates en compagnie du capitaine du navire ; joyeux et repus comme ces vieux loups de mer que l’on voit refaire le monde dans les couloirs du métropolitain parisien, ohé, ohé…

 

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Les 22 bars par Monsieur Maill.et :

 

 

Nous sommes partis à l’aventure, un voyage extraordinaire au cœur de Paris. C’était une journée ensoleillée où les bistrots nous souriaient comme des putains. Puis, peu à peu les rues ont fondu et la nuit est venue, belle comme le jour, chaude comme une saucisse et douce comme la peau du cul de celle à qui je pense. Les baleines, les cochons et les coings n’ont jamais été aussi bourrés que moi. C’était chouette, j’avais une bonne excuse pour faire les bêtises que j’aime : tripoter les jolies filles, faire pipi en marchant, des acrobaties sur les bouches de métro, dire bonjour aux passants, insulter les galeristes, rire, roter, bâiller, péter, tousser, chanter, crier quand et où je veux. Mes camarades et moi étions devenus les rois du monde, persuadés que nos ivrogneries marquaient un tournant dans l’histoire de l’art.

 

Alain - bar n°1 - L'éléphant du nil - 14h26
Alain - bar n°2 - Le Saint Paul - 14h43
Alain - bar n°3 - Bucheron - 15h04
Alain - bar n°4 - Le pick clop - 15h29
Alain - bar n°5 - Athmosphère - 15h51
Alain - bar n° 6 - Au petit fer à cheval - 16h14
Alain - bar n°7 - L'étoile manquante - 16h55
Alain - bar n°8 -  Okawa - 16h59
Alain - bar n°9 - Le voltigeur - 17h24
Alain - bar n°10 - Le chamois - 17h57
Alain - bar n°11 - Le saint gervais - 18h20
Alain - bar n°12 - Le marécage - 18h42
Alain - bar n°13 - Le progrès - 19h26
Alain - bar n°14 - Le diplomate - 19h59
Alain - bar n°15 - Les ferrailleurs - 21h31
Alain - bar n°16 - Le lèchevin - 22h14
Alain - bar n°17 - Café des anges - 23h07
Alain - bar n°18 - A la renaissance - 23h36
Alain - bar n°19 - Au métro - 0h07
Alain - bar n°20 - Le cadran du 11ème - 0h37
Alain - bar n°21 - L'étoile - 1h10
Alain - bar n°22 - Le bistrot du peintre - 1h44
Laurent - bar n°1 - L'éléphant du Nil - 14h26
Laurent - bar n°2 - Le saint Paul - 14h42
Laurent - bar n°3 - Bucheron - 15h03
Laurent - bar n°4 - Le pick clops - 15h26
Laurent - bar n°5 - Atmosphère - 15h51
Laurent - bar n°6 - Au petit fer à cheval - 16h10
Laurent - bar n°7 - L'étoile manquante - 16h55
Laurent - bar n°8 - Okawa - 17h00
Laurent - bar n°9 - Le voltigeur - 17h26
Laurent - bar n°10 - Le chamoix - 17h57
Laurent - bar n°11 - Le Saint Gervais - 18h22
Laurent - bar n°12 - Le marécage - 18h44
Laurent - bar n°13 - Le progrès - 19h26
Laurent - bar n°14 - Le diplomate - 19h35
Laurent - bar n°15 - Le ferrailleur - 21h30
Laurent - bar n°16 - Le lèche vin - 22h20
Laurent - bar n°17 - Le café des anges - 23h05
Laurent - bar n°18 - A la renaissance - 23h38
Laurent - bar n°19 - Le métro - 23h55
Laurent - bar n°20 - Le cadran du 11ème - 0h42
Laurent - bar n°21 - L'étoile - 1h00
Laurent - bar n°22 - Le bistrot du peintre - 1h44
Monsieur Maill.et - bar n°1 - L'éléphant du Nil - 14h26
Monsieur Maill.et - bar n°2 - Le Saint Paul - 14h43
Monsieur Maill.et - bar n°3 - Bucheron - 15h05
Monsieur Maill.et - bar n°4 - Le pick clops - 15h29
Monsieur Maill.et - bar n°5 - Atmosphère - 15h51
Monsieur Maill.et - bar n°6 - Au petit fer à cheval - 16h15
Monsieur Maill.et - bar n°7 - L'étoile manquante - 16h55
Monsieur Maill.et - bar n° 8 - Okawa - 16h59
Monsieur Maill.et - bar n°9 - Le voltigeur - 17h25
Monsieur Maill.et - bar n°10 - Le chamois - 17h57
Monsieur Maill.et - bar n°11 - Le Saint Gervais - 18h20
Monsieur Maill.et - bar n°12 - Le marécage - 18h42
Monsieur Maill.et - bar n°13 - Le progrès - 19h26
Monsieur Maill.et - bar n°14 - Le diplomate - 19h59
Monsieur Maill.et - bar n°15 - Les ferrailleurs - 21h31
Monsieur Maill.et - bar n°16 - Le lèche vin - 22h14
Monsieur Maill.et - bar n°17 - Café des anges - 23h07
Monsieur Maill.et - bar n°18 - A la renaissance - 23h36
Monsieur Maill.et - bar n°19 - Au métro - 0h07
Monsieur Maill.et - bar n°20 - Cadran du XXIème - 0h37
Monsieur Maill.et - bar n°21 - L'étoile - 1h10
Monsieur Maill.et - bar n°22 - Le bistrot du peintre - 1h44